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Catherine et son trouble des fonctions exécutives

Marielle Potvin blogueuse pour Kaleido

Écrit par : Marielle Potvin

29 juin 2015

Les signes d’un trouble des fonctions exécutives

Il est bien possible que vous n’ayez jamais entendu cette expression, même si vous êtes plutôt au fait des troubles d’apprentissage. Pourtant, le trouble des fonctions exécutives est assez courant et est souvent associé ou confondu avec le TDAH (trouble déficitaire de l’attention).

J’ai suivi, durant quelques mois, une jeune fille qui avait reçu ce diagnostic. D’une intelligence vive, Catherine s’était développée normalement depuis son tout jeune âge. Tout au long de son primaire, elle réussissait même, le plus souvent, avec des performances au-dessus de la moyenne. J’ai fait sa connaissance en début de secondaire, à la suite de la remise de son premier bulletin et voici quelques remarques que comportait celui-ci :

  • « Catherine a de la difficulté à établir des priorités, à commencer une tâche, à organiser et à accomplir son travail, surtout quand il faut composer avec des échéances ou des événements imprévus. »
  • « Grandes difficultés en résolution de problèmes. »
  • « Catherine ne semble pas pouvoir retenir ses impulsions immédiates et se concentrer sur son travail. »
  • « En classe, elle passe quelquefois des commentaires hors sujet ou inappropriés. »
  • « Cette élève aurait avantage à mieux s’organiser et à mieux gérer son temps. »

Bref, cela semblait mal parti ! Dommage, puisqu’elle avait travaillé très fort pour être admise dans une école privée, fréquentée aussi par ses amies. Ses parents, voulant en avoir le coeur net, ont demandé une évaluation en neuropsychologie.

Quels sont les différents aspects des fonctions exécutives ?

Voici plusieurs aspects des fonctions exécutives qui sont évalués lors d’une évaluation en neuropsychologie :

L’organisation et la planification :
Il s’agit de la capacité à utiliser des stratégies efficaces, à établir des priorités, à anticiper et prévoir les étapes d’une tâche.
L’inhibition :
C’est la capacité à résister aux distractions ou à inhiber une réponse attendue ou un commentaire qui nous traverse l’esprit. Cette capacité est souvent comparée à un filtre ou à un frein.
La flexibilité mentale :
Ici, on parle de la capacité à s’adapter à la nouveauté et aux changements.
Le jugement :
C’est la capacité à évaluer la meilleure alternative, face à un problème en fonction des buts à atteindre, des valeurs et des règles sociales. Ceci permet de prendre des décisions appropriées et d’adopter des comportements adaptés aux situations.
L’autocritique :
Finalement, cette fonction a pour but d’évaluer convenablement ses propres capacités et comportements et à être conscient de ses forces et de ses difficultés.

À quoi servent les fonctions exécutives ?

Les fonctions exécutives sont impliquées dans toutes les actions orientées vers un but.
Il s’agit d’un ensemble de fonctions qui est souvent comparé à un contremaître ou à un chef d’orchestre dont l’objectif est de coordonner efficacement les autres fonctions cognitives. En tant qu’adulte, par exemple, si nous voulons résoudre un problème ou planifier un voyage, nous allons :

  • Avoir une vue d’ensemble de ce que nous désirons faire ou visiter,
  • Trouver un plan, prendre des informations,
  • Planifier une solution, tracer un itinéraire,
  • Évaluer l’efficacité de la solution ou le degré de satisfaction du voyage.

Les fonctions exécutives orchestrent toutes ces étapes.
Chez Catherine, ces fonctions font défaut, en raison d’une immaturité neurologique. Serait-elle liée au fait de sa naissance prématurée ? Un mois d’avance est-il si significatif ? Nous n’en sommes pas certains.

Ce qui est sûr, c’est que le développement du cerveau se fait toujours de l’arrière vers l’avant, et que ce sont les lobes frontaux qui sont responsables des fonctions exécutives. Or, c’est justement cette partie du cerveau qui se développe en dernier.

Mais que faire, maintenant ?

Élaborer un plan d’intervention

Lors de l’élaboration d’un plan d’intervention, à son école, nous avons choisi d’accorder la priorité aux stratégies suivantes:

Pour l’aider à planifier son travail et à mieux gérer son temps :

  • Fragmenter son travail en différentes parties,
  • Utiliser un mot-clé et un signal visuel pour lui indiquer qu’il faut commencer son travail,
  • Donner, en plus des instructions verbales, des instructions visuelles, quand c’est possible, ainsi que des exemples,
  • Utiliser des repères graphiques pour exposer les étapes d’un travail et les échéances,
  • Utiliser une minuterie visuelle et/ou un chronomètre,
  • Enseigner de façon explicite à l’élève à utiliser un agenda, et l’inciter à le faire,
  • Renforcer les améliorations et les efforts,
  • Donner de fréquentes rétroactions,
  • Vérifier plus souvent le travail de cette élève,
  • Utiliser des listes de vérification et d’autocorrection, quand c’est possible,
  • Prévoir des contrats d’exécution du travail assortis de conséquences claires,
  • Prévoir une pause lorsque chaque segment du travail est terminé.

Pour l’aider à développer une vue d’ensemble de son travail et à modifier sa façon de faire, au besoin :

  • Interroger l’élève sur son processus de résolution de problèmes,
  • Modéliser des stratégies efficaces pour la résolution de problèmes,
  • Utiliser des repères graphiques pour présenter les étapes des tâches et renforcer les techniques de résolution de problèmes (définition du problème, détermination des options, évaluation des options, choix d’une option, réflexion sur le choix…)
  • Donner des exemples.

Pour l’aider à contrôler son inhibition :

  • Enseigner des façons appropriées de demander de l’aide,
  • Enseigner de façon explicite les habiletés sociales qui lui font défaut,
  • Donner des exemples,
  • Demander à l’élève de verbaliser ses pensées, ou les écrire,
  • Renforcer les améliorations et les progrès.
  • Si possible, la prévenir lors d’un changement important à l’horaire.

Et après ?

Heureusement, ses enseignants ont bien compris que Catherine n’était pas de mauvaise foi, et avait des difficultés bien réelles. Cette année, elle fréquente toujours la même école, entourée de ses amies.

Ses difficultés se sont grandement résorbées, en grande partie grâce à la collaboration et aux efforts qu’elle a fourni. Ses parents et ses enseignants ont fait preuve de compréhension à son égard.

Cependant, sa maturité neurologique, qui se poursuit, en est aussi responsable. Le développement de ses lobes frontaux n’est certes pas terminé, mais avec l’aide reçue, Catherine a pu préserver sa confiance en elle, et envisage positivement de longues études.

Source :

Les fonctions cognitives par l'Association québécoise des neuropsychologues (AQNP)

En complément :

Les fonctions exécutives, Wikipédia.
Comprendre les fonctions exécutives.

Apprendre, une question de stratégies
Cet ouvrage traite des habiletés liées à six fonctions exécutives du cerveau : l’activation, l’inhibition de l’impulsivité, la flexibilité, la planification, la mémoire de travail et la régulation des émotions. L’ouvrage propose aux intervenants des milieux scolaires et de réadaptation une définition de ces fonctions exécutives de même qu’un répertoire d’activités qui visent à faire prendre conscience aux élèves des habiletés associées à ces fonctions.

 

Marielle Potvin, orthopédagogue
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